Rencontre avec le chef Thierry Marx. Le parrain de la 11e édition de La Part des Anges évoque son rapport au cognac, ainsi que ses inspirations pour des accords parfaits.
En quoi le Cognac vous intéresse-t-il ?
Ce qui m’intéresse dans le Cognac c’est son histoire, sa partie historique est très inspirante, ses racines donc et puis, son évolution, cette transmission qu’il y a dans le cognac qui me parait extrêmement intéressante. Elle porte les valeurs de la gastronomie française, elle donne de la mémoire à de l’éphémère, quelque chose que l’on boit est éphémère, c’est comme quelque chose que l’on mange, et finalement on en garde la mémoire, parce que les arômes, parce que l’histoire, parce que les racines de ce produit ; et voilà ce qu’il me plait dans le Cognac.
Vous êtes sensible aux savoir-faire du Cognac ? Pourquoi ?
Les métiers du savoir-faire au niveau du Cognac sont des métiers d’excellence. Pourquoi ? Parce qu’il y a d’abord toute la maitrise de l’artisanat, l’artisanat du bois, du vieillissement, la maitrise du feu, la maitrise de tout ce qui va faire le travail de la terre et de la taille de la vigne, de cette récupération du produit de la vigne ; et puis cette sophistication qu’on va amener jusqu’à la distillation et au vieillissement. Donc bien évidemment comme c’est patrimonial, et bien il a un sens profond. Dans patrimoine, il y a père, dans père il y a repère et le Cognac est un repère pour la gastronomie française. C’est drôle parce que, ce qui est étonnant, pas drôle mais étonnant, c’est ce que Cognac a fait, a participé à la reconnaissance de la cuisine française dans le monde entier parce qu’il est justement un repère avec le même sens profond des valeurs, des terroirs.
Vous êtes sensible au cognac : pourquoi ?
Quel trait d’union entre Thierry Marx et le cognac ? Une sensibilité émotionnelle par rapport à un produit, c’est-à-dire que ce qui est intéressant dans le cognac c’est qu’il vous séduit à l’œil, il vous fait un clin d’œil finalement. Il est tellement beau par sa couleur, donc il est inspirant. Après il y a la partie olfactive, et puis ensuite il y a la partie dégustation. Donc pour moi, c’est comme la cuisine, un cognac ça se regarde, ça se médite et ça se boit ; la cuisine ça se regarde, ça se médite et ça se mange.
Les cognacs à table et en accords : quelles inspirations ?
Le cognac pour moi en accord, l’inspiration est assez simple. Dans le cognac, il y a une forme de finesse, il y a des arômes extrêmement puissants, extrêmement faciles à reconnaître dans les arômes boisés, par exemple, où vous retrouvez des pointes légèrement vanillées, des arômes de fruits aussi que vous retrouvez dans le cognac bien évidemment. Et bien avec la pâtisserie, comme avec un met, mais un met simplement grillé, vous savez par exemple une viande qui va être simplement poêlée, ou un poisson simplement rôti, peut très bien se marier avec un cognac plus ou moins jeune. Et un dessert, c’est la même chose, quand vous avez des arômes de chocolat, des tonicités chocolat et des tonicités de cognac, l’accord se fait, ce « food-pairing » comme disent les anglais, se fait merveilleusement bien.
Thierry Marx, l’Asie et le cognac ?
Finalement, tout le monde m’a étiqueté « chef aimant le Japon », « chef aimant l’Asie » ; c’est vrai, j’aime l’Asie pour sa philosophie par moment, son bouddhisme zen, c’est un tas de chose qui m’ont ramené près de l’Asie. Mais le cognac, bien qu’il soit extrêmement apprécié en Asie, pour moi je vois dans la dégustation cuisine-cognac, le seul trait d’union finalement qu’il y aurait entre cette cuisine, c’est encore une fois je le redis, ça se regarde ça se médite, ça se mange. Cette sérénité pour donner de la mémoire à de l’éphémère, c’est tout ce que je constate dans cette relation à l’Asie, ce trait d’union entre ma cuisine et l’Asie. Mais c’est juste de donner de la mémoire à de l‘éphémère sans avoir à trop exagérer les choses.
Une anecdote liée au Cognac ?
J’ai appris à déguster les cognacs comme le font les parfumeurs, sur le dos de ma main, sur des palettes d’arômes. Et puis ensuite, quelques années après, quand j’ai commencé à avoir une accessibilité aux grands cognacs, j’ai commencé à pouvoir boire du cognac. Donc un jour, je me retrouve dans une dégustation de cognacs et en cachette, pour faire des notes d’arômes j’écrasais, je trempais mon pouce dans le verre de cognac et je mettais ça sur le dos de ma main.
Les gens me regardaient faire « mais il est fou ce type », mais j’arrivais à trouver ces notes d’arômes à la façon d’un parfumeur.
Donc j’inquiétais beaucoup les dégustateurs, et puis finalement ils ont un petit peu compris ma démarche, et après ils m’ont dit « tu vas déguster » et en bouche, effectivement, là, il y avait une appréciation qui était différente. Mais les premières notes d’arômes, je surprenais tous les dégustateurs, parce que je dégustais comme un parfumeur finalement.
D’ailleurs j’ai même pensé qu’un jour il y aurait un parfum qui pourrait s’appeler Cognac, je pense qu’on pourrait vraiment quelque part, de temps en temps, faire de cette petite part des anges, un petit parfum qui serait une bulle d’instant Cognac.